À la fin du mois d'octobre, je me suis rendu à Windsor en Ontario pour participer au Symposium annuel de la Euthanasia Prevention Coalition, où j'étais invité à présenter le portrait de la situation de l'euthanasie au Québec. Cette rencontre annuelle avait cette année un thème très percutant: résister à l'euthanasie et au suicide assisté. Encore une fois, ce rendez-vous a donné lieu à de très beaux échanges et à un riche partage d'expériences et de compréhension des enjeux actuels, tant au Canada qu'ailleurs dans le monde.
Du côté des actualités québécoises, le Congrès mondial sur les soins palliatifs a été l'occasion de rendre public l'inquiétude généralisée concernant l'avenir des soins palliatifs au Québec. Selon des experts présents, l’arrivée de l’euthanasie expose le milieu des soins palliatifs au Québec à un risque de « fracture et d’implosion » en raison des pressions croissantes exercées pour « faire pénétrer l’aide à mourir » dans ses milieux de soins (>>).
Par ailleurs, la Commission sur les soins de fin de vie (CSFV), chargée de surveiller l'application de la loi sur l'euthanasie au Québec, a publié son premier rapport annuel d'activités (>>). Loin d'apaiser nos inquiétudes, ce rapport confirme plutôt le fondement de nos préoccupations.
D'abord, le nombre d'euthanasies au Québec explose les prévisions: en date du 1er septembre, 262 euthanasies ont déjà eu lieu, alors que les prévisions officielles parlaient de 50 à 100 demandes durant la première année. À ce rythme-là, nous pourrions atteindre 300 euthanasies au cours de la première année seulement.
Ensuite, le rapport de la CSFV est alarmant de par le nombre de cas douteux: déjà 21 cas se sont en effet avérés problématiques. Parmi eux, 18 cas concernent l'indépendance du second médecin; 2 cas mentionnent un problème avec le critère de fin de vie et 1 cas soulève des questions à savoir si le patient était réellement atteint d'une maladie grave et incurable.
Ces problèmes majeurs méritent une attention sérieuse des autorités gouvernementales qui ne devraient pas prendre à la légère ces dérives qui arrivent moins d'un an après l'entrée en vigueur de la loi. Malheureusement, il semble que le gouvernement du Québec continue sa lancée dans la mauvaise direction. Le Ministre de la Santé, après avoir manifesté sa surprise devant le nombre de cas d'euthanasies, parle déjà de simplifier les formulaires des médecins qui rendent compte de leurs euthanasies, et de réévaluer le critère exigeant l'avis d'un deuxième médecin.
Vivre dans la dignité entend suivre le dossier de près et presser les autorités pour qu'elles donnent suite à ce qui pourrait être considéré comme des infractions criminelles. Nous ne pouvons pas accepter que les problèmes trouvent continuellement leur solution en étant simplement normalisés par de nouvelles directives.
Aubert Martin, directeur
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2016