Montréal, 15 avril 2016 – Alors que le Canada traverse une des pires crises de suicide de son histoire, le gouvernement fédéral vient de déposer son Projet de loi C-14 qui propose de légaliser à la fois l’euthanasie et le suicide assisté partout au Canada, encore sous le pseudonyme « aide médicale à mourir ». La valse des mots continue alors qu’on écorche encore les soins palliatifs en présentant « l’aide médicale à mourir » comme l’alternative à une mort souffrante et intolérable.
D’entrée de jeu, le projet de loi établit clairement la gravité de ce que notre société s’apprête à accepter : il modifie le Code criminel pour « créer des exemptions à l’égard des infractions d’homicide coupable, d’aide au suicide et d’administration d’une substance délétère, dans le but de permettre aux médecins et aux infirmiers praticiens de fournir l’aide médicale à mourir et aux pharmaciens ainsi qu’à d’autres personnes de leur porter assistance à cette occasion ».
Ces personnes ne seraient pas tenues criminellement responsables si elles devaient commettre une euthanasie ou aider un patient à se suicider. Pas plus que les personnes aidant le médecin ou l’infirmier praticien ou « quiconque fait quelque chose, à la demande expresse d’une autre personne, en vue d’aider celle-ci à s’administrer la substance qui a été prescrite pour elle dans le cadre de la prestation de l’aide médicale à mourir ». Tout citoyen et toute citoyenne pourra donc, sans craindre de poursuites judiciaires, aider une autre personne à se suicider si son état correspond aux critères établis par la loi: un parent, un ami, un frère, une sœur, etc.
Sans surprise, les personnes qui souffrent ne seront pas obligées d’être en fin de vie pour avoir accès au suicide assisté. On devra seulement reconnaître que leur « mort naturelle [est] devenue raisonnablement prévisible, [ce qui veut dire que ce n’est] pas nécessaire d’avoir une proximité précise de la mort ». Aux dernières nouvelles, il nous semble que toute mort est raisonnablement prévisible.
Par ailleurs, le gouvernement fédéral ratisse large dans sa liste des conditions de vie qui ne valent pas la peine d’être vécues, en incluant les personnes avec une maladie, une affection ou un handicap graves et incurables, celles en perte d’autonomie ou celles avec des souffrances physiques ou psychologiques persistantes « qui lui sont intolérables et qui ne peuvent être apaisées dans des conditions qu’elle juge acceptables ». En dressant une série de circonstances où il sera maintenant acceptable de se suicider avec la participation d’un médecin et la complicité de l’État, le gouvernement fédéral cautionne un très grand nombre de raisons suffisantes pour vouloir mourir… à condition d’être âgé d’au moins 18 ans.
Nous sommes déjà bien loin de l’idée qu’on nous a vendue au départ : de quelques cas exceptionnels, nous sommes officiellement rendus à un soi-disant « soin de santé » au même titre que les autres. L’accès à l’euthanasie et au suicide assisté est tellement prioritaire que le projet de loi fédéral propose qu’une personne puisse abréger son temps de réflexion (fixé à 15 jours) si sa mort naturelle devient imminente – ce qui piétine du même coup l’argument de la Cour Suprême du Canada qui prétendait que « l’aide médicale à mourir » aurait pour effet d’empêcher des gens de s'enlever la vie prématurément...
En somme, devant l’écran de fumée qu’aura été le rapport scandaleux du Comité mixte, le projet de loi C-14 donne la fausse impression d’être strict et mesuré. Mais il suffit de lire plus loin pour comprendre où l’on veut en arriver : on estime déjà que « des études additionnelles sur les demandes par des mineurs matures, les demandes anticipées et les situations où la maladie mentale est le seul problème de santé sous-jacent » seront nécessaires après l’entrée en vigueur de la loi.
Il faut prévoir une loi éventuellement encore plus permissive. Elle viendra en son temps, lorsque la population aura avalé cette première pilule empoisonnée.
Quiconque respecte encore la dignité inhérente et inaliénable de chaque personne humaine et porte encore le souci du bien commun n’a qu’une chose à faire à l’heure actuelle : interpeller son député ou sa députée pour tenter de bloquer ce projet de loi indigne de la société canadienne.
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2016