Etienne MONTERO, Doyen de la Faculté de droit de Namur
Dix ans après sa mise en œuvre, que pensez-vous de l’application de la loi sur l’euthanasie ?
A la lecture des rapports de la commission de contrôle et d’évaluation, ce qu’on constate c’est la difficulté d’un contrôle a posteriori. La commission dit elle-même qu’il est très difficile d’évaluer le nombre d’euthanasies réellement pratiquées. La commission est aussi tributaire des déclarations que doivent remplir les médecins. Est-ce qu’on peut sincèrement penser qu’un médecin qui ne s’est pas conformé aux conditions de la loi va le dire et se mettre ainsi en difficulté ? Ce n’est pas réaliste.
Il avait été dit qu’on ne pratiquerait pas l’euthanasie dans des cas de souffrance purement psychique. Or, maintenant, la commission de contrôle avalise ces cas. D’autre part, une des conditions de la loi est qu’ “une personne doit faire état d’une souffrance insupportable qui ne peut être apaisée et qui résulte d’une pathologie grave”. Or, on constate que la commission admet toute une série de cas où il n’y a pas cette pathologie grave.
Certains plaident pour un nouvel élargissement du champ de la loi, notamment à l’égard des mineurs et des déments.
J’estime que ces propositions d’élargissement constituent une critique radicale de la loi puisque la clé de voûte de la loi actuelle, c’est le respect de l’autonomie. C’est l’euthanasie sur demande, exprimée par une personne consciente ou moyennant une déclaration anticipée, pour qu’elle soit appliquée “dans une situation irréversible”. Or, dans pas mal de propositions de loi, on va vers des euthanasies sans demande, notamment envers des personnes qui sont dans le coma, des déments, des personnes qui sombrent dans la maladie d’Alzheimer. On voudrait pouvoir accéder à l’euthanasie pour ces personnes. Je trouve cette évolution très inquiétante. Elle va instiller le doute et la méfiance au sein des familles.
Certaines institutions, du côté francophone, interdisent ou déconseillent très fort au médecin de pratiquer l’euthanasie.
Commentaires: Comment se fait-il que la délégation québécoise de la commission mourir dans la dignité n'a pas mentionné ces faits dans leur rapport remis à l'Assemblée Nationale?
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