Réaction de Vivre dans la Dignité aux demandes anticipées d’aide médicale à mourir dès le 30 octobre au Québec

« Ne pas reconnaître ses enfants »

« Ne pas pouvoir s’alimenter, aller à la toilette ou marcher seul »

« Paraître angoissé »

Où tracerons-nous la ligne?

Montréal, le 9 septembre 2024 – Le réseau citoyen Vivre dans la Dignité réagit à la mise en place de l’aide médicale à mourir par demande anticipée dès le 30 octobre au Québec :

L’annonce des débuts prochains d’un régime de demandes anticipées visant à recevoir l’aide médicale à mourir au Québec met en lumière plusieurs problématiques associées à cet élargissement de la Loi concernant les soins de fin de vie.

L’un des enjeux principaux sera la liste des motifs possibles à inscrire dans une demande anticipée d’aide médicale à mourir pour une personne ayant reçu le diagnostic d’un trouble neurocognitif majeur (tel que la maladie d’Alzheimer). Les protocoles d’évaluation et d’administration sont toujours attendus. Toutefois, s’il faut en croire les discussions qui ont eu lieu au moment de l’étude parlementaire du projet de loi 11 (Loi modifiant la Loi concernant les soins de fin de vie et d’autres dispositions législatives) adopté en 2023, il n’y aura pas de listes de motifs inadmissibles. Le tout sera laissé au bon jugement des divers intervenants (patient avec un diagnostic de maladie neurodégénérative, un professionnel compétent, un tiers de confiance et, pour ceux qui le souhaiteront, un notaire).

En entrevue le samedi 7 septembre, Mme Sonia Bélanger, ministre déléguée à la Santé et aux Aînés, a donné une idée des motifs acceptables à inclure dans des demandes anticipées :

« Quand je ne reconnaitrai plus, par exemple, mes enfants, quand je ne serai plus en mesure de m’alimenter seul, quand je ne serai plus capable de marcher seule, d’aller à la toilette, quand j’aurai des souffrances physiques, que je paraîtrai angoissée, alors à ce moment, je souhaiterais que l’on puisse m’évaluer pour recevoir l’aide médicale à mourir. »

Vivre dans la Dignité craint que l’inclusion possible d’un si large éventail d’incapacités contribue à stigmatiser toutes les personnes qui perdent leurs aptitudes à reconnaître un proche, s’alimenter, se laver, marcher (etc.) à un moment ou à un autre de leur vie. C’est bien d’aide à vivre dont elles ont besoin, pas d’une aide médicale à mourir sous un vernis de compassion.

Comme balise, on nous promet qu’il faudra que les deux professionnels compétents qui évalueront l’état du patient avant de procéder à l’aide médicale à mourir constatent chez lui des signes de souffrance.

En absence de critères objectifs, il nous semble clair que la porte est toujours grande ouverte à l’administration de l’AMM même en cas de démence heureuse : certains médecins ont déjà affirmé que cette condition de bonheur apparent cache une souffrance intérieure.

 

En attente de clarifications essentielles

Avant la mise en œuvre de ce nouvel élargissement de la loi sur l’aide médicale à mourir, beaucoup de clarifications seront essentielles. Voici trois exemples de questions en suspens :

– Les poursuites privées face à une pratique interdite par le code criminel canadien seront-elles vraiment impossibles?

– Quels seront les protocoles d’’injection létale à des personne inaptes qui ne s’attendront pas à ce que l’on mette fin à leurs jours?

– Y aura-t-il des études préalables sur les conséquences à prévoir sur les familles et le personnel soignant?

En lieu et place des demandes anticipées d’AMM, la recommandation du réseau citoyen Vivre dans la Dignité est simple :

« Plutôt que de franchir la frontière de l’inaptitude pour accéder à l’AMM, mieux vaudrait investir massivement dans les soins gériatriques et dans l’accompagnement des personnes vivant avec un trouble neurocognitif ».

Rappel de la recommandation 1 de notre mémoire présenté en 2023 lors de l’étude du projet de loi 11, loi modifiant la Loi concernant les soins de fin de vie.

-30-

 

Pour entrevues :

Jasmin Lemieux-Lefebvre
Coordonnateur
Réseau citoyen Vivre dans la Dignité
info@vivredignite.org

0