Pourquoi autant d’impatience?

À l’approche de la date fatidique qui inaugurera la très controversée Loi concernant les soins de fin de vie, le 10 décembre prochain, voilà que nous apprenons que l'Ontario et la Colombie-Britannique se disent prêtes à ce que le gouvernement fédéral demande plus de temps pour formuler sa loi suite au jugement de la Cour suprême sur la décriminalisation du suicide assisté au Canada.

Devant l’attitude de ces deux provinces, patientes et respectueuses du Code criminel canadien, nous sommes en droit de nous poser la question : pourquoi le Québec fait-il preuve d’autant d’empressement à mettre en place une loi qui légalisera l’euthanasie sur son territoire avant même de connaître les conclusions du gouvernement fédéral sur cette question?

L’argument chétif utilisé par le gouvernement du Québec pour pouvoir passer sa loi avant l'entrée en vigueur de la décision Carter – « il ne s'agit pas d'euthanasie à cause du cadre médical » – tient aussi mal la route qu’un minibus bondé sur les routes de Ouagadougou.

Malheureusement, cette attitude de défiance de nos politiciens exposera bientôt les médecins et les institutions de santé du Québec à poser ou à cautionner des actes légalement passibles de poursuites judiciaires.

En effet, malgré son camouflage « d’aide médicale à mourir », l’euthanasie se trouve toujours légalement et constitutionnellement interdite par la loi criminelle canadienne, et cet état de fait prévaudra toujours le 10 décembre prochain.

D’ailleurs, l’Association Canadienne de Protection Médicale (ACPM) a indiqué sur son site que d’ici l’entrée en vigueur de la cause Carter, « l’ACPM a les même conseils pour les membres du Québec que pour les membres du reste du pays : la loi continue actuellement d’interdire à quiconque de conseiller, d’aider ou d’encourager une personne à se suicider ».

Le minimum de respect exigerait que le Québec attende la conclusion légale du jugement Carter. Et dans le cas où il refuserait de reporter sa date butoir (sans jeu de mots), le gouvernement du Québec se placerait dans une position tout à fait en rupture avec le souhait d'une nouvelle collaboration fédérale-provinciale exprimé démocratiquement aux dernières élections.

De surcroît, s’il parvenait à passer une loi dont le fondement trahit la constitution canadienne sous le couvert de beaux mots, le Québec consacrerait la victoire des euphémismes dans notre société.

Ironiquement, il imposerait ainsi son idéologie en s’exposant à des risques de guerre constitutionnelle avec le fédéral qu’il pourrait éviter s’il tenait compte du principe de la médecine scientifique qu’il s’apprête à renier avec son « aide médicale à mourir »: le bénéfice doit l'emporter sur le risque.

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