Depuis l’arrivée de la COVID-19, nous vivons un branle-bas de combat d’une ampleur inédite. Pour se protéger contre une avalanche de cas susceptibles de déborder les ressources sanitaires, des mesures d’une ampleur et d’un coût faramineux sont prises. Chacun est obligé à des mesures sanitaires contraignantes pour se protéger soi-même comme pour protéger les autres, réduisant les contacts entre les personnes et donc la rapidité de la transmission de la maladie.
Et nous sommes collectivement respectueux des directives contraignantes qui servent cette stratégie sanitaire, malgré les difficultés et les sacrifices qu’elles entraînent. Voilà une réponse forte devant cette agression d’amplitude mondiale. Et on ouvre à tous les hôpitaux, les soins intensifs, les cliniques, mettant obligatoirement à risque les soignants.
Quelle éclatante démonstration de notre respect pour la vie des autres, de tous les autres, surtout de celle des personnes âgées, malades ou immunodéprimées qui sont souvent les premières victimes de ce virus! Je vois là un signe irréfutable de notre forte perception commune de la valeur intrinsèque de la vie. On veut la protéger, la guérir, même l’isoler temporairement, dans l’espoir de la retrouver ensemble dans une liberté renouvelée.
Est-ce là la même société qui faisait hier la promotion de la fin de la vie volontairement choisie, de la mort administrée par les soignants? Celle-là qui trouvait que la vie perdait progressivement de sa valeur avec les contraintes de la maladie et avec les limitations physiques, mentales ou sociales, avec la souffrance? Et qu’il convenait alors d’accepter de l’abréger sur demande, même si la fin de vie n’était pas prévisible à brève échéance?
Vous me direz qu’il s’agit de situations différentes! Et pourtant… Il y a là un contraste qui nous impose une réflexion. Si nous devons soigner, nous devons soigner tout le monde. Nous ne devons pas choisir qui on soigne et qui on abandonne. Nous ne devons pas décider qui guérira peut-être, et mérite donc nos soins, et qui ne guérira peut-être pas. N’est-ce pas pourtant ce que nous faisons au fond en acceptant de faire mourir quelqu’un sur demande sans connaître son futur? Ne devrions-nous pas examiner ce paradoxe et en tirer une nouvelle prudence?
Patrick Vinay, M.D., PhD
Président
Vivre dans la Dignité
APR
2020