10 questions pour souligner les 10 ans de la Loi concernant les soins de fin de vie au Québec

Montréal, 5 juin 2024 – Le 5 juin 2014, le projet de loi 52 était adopté à l’Assemblée nationale du Québec sous le nom de Loi concernant les soins de fin de vie. Rappelons le résultat du vote: 94 voix pour, 22 voix contre.

Dix ans plus tard, le Québec est l’endroit au monde où le recours à l’aide médicale à mourir (AMM, appelée euthanasie à l’extérieur du Canada) est le plus fréquent. Alors que le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), le Fonds de recherche du Québec – Société et culture (FRQSC) et le Fonds de recherche du Québec – Santé (FRQS) ont mandaté en mars dernier un groupe de recherche pour « mieux comprendre le recours à l’AMM en contexte québécois », le réseau citoyen Vivre dans la Dignité propose aujourd’hui 10 questions afin de réfléchir à des aspects souvent méconnus des impacts de cette Loi :

1) Pourquoi le Québec est-il toujours le seul endroit au monde à faire de l’AMM un soin?

2) Pourquoi le Québec et le Canada sont-ils proposés en contre-exemples à suivre dans tous les pays réfléchissant à des législations pouvant ouvrir la voie à une forme d’aide à mourir, euthanasie ou suicide assisté?

3) Les données sur les 15 997 administrations d’AMM (entre le 10 décembre 2015 et le 31 mars 2023) compilées par la Commission sur les soins de fin de vie sont obtenues par le biais d’auto-déclarations des prestataires d’AMM. Sachant que tout écart par rapport aux critères de la Loi peut donner lieu à des poursuites pénales ou à des mesures disciplinaires, est-ce que la formule d’auto-déclaration permet vraiment d’affirmer qu’il n’y a aucune dérive depuis 2014?

4) Après les demandes anticipées d’AMM pour des personnes inaptes à consentir (vivant avec des troubles neurocognitifs), dont l’application est attendue d’ici juin 2025 au Québec, quels élargissements de l’accès à l’AMM seront envisagés par la suite? Mineurs matures? Personnes vivant avec un trouble mental (accès prévu en mars 2027 au Canada)? Fatigue de vivre?

5) Pourquoi prétendre que l’AMM par demande anticipée (DA) ne sera pas possible dans les cas de « démence heureuse » alors que le médecin expert invité en Commission parlementaire par le Gouvernement du Québec pour clarifier ce point a affirmé en avril 2023 qu’il faudra respecter les volontés exprimées par le patient dans ses DA (souffrances psychiques causées par l’incontinence, le fait de ne pas reconnaitre ses proches, etc.) ?

6) Pourquoi avons-nous fait du Québec le seul endroit au monde où tous les milieux hospitaliers et toutes les maisons de soins palliatifs sont obligés d’offrir l’AMM, sans exception pour ceux et celles qui préfèrent vivre leurs derniers jours dans un milieu de vie où l’on ne provoque jamais la mort?

7) Pour beaucoup de personnes (soignants, patients, familles et proches) au Québec comme ailleurs, l’AMM / euthanasie est vécue comme une expérience positive. Selon le professeur Theo Boer,  ancien contrôleur des cas d’euthanasies au Pays-Bas, la liberté des uns peut devenir la contrainte des autres. Depuis 2014, combien de Québécoises et de Québécois manquant de soutien, de soins ou de services appropriés n’ont pas été vraiment libres au moment de choisir l’AMM?

8) Pourquoi caricaturer les critiques de l’AMM en les associant à la droite religieuse, alors que des citoyens de tous les horizons politiques, croyants, agnostiques et athées questionnent l’AMM et les élargissements à son accès par une argumentation philosophique, médicale et éthique?

9) La Loi concernant les soins de fin de vie inclut aussi le droit de recevoir des soins palliatifs. Comment se fait-il que l’accès des Québécoises et Québécois à des soins palliatifs de qualité au moment et dans le milieu de vie de leur choix dépend parfois de leur code postal?

10) Pourquoi, 10 ans après l’adoption de la Loi concernant les soins de fin de vie, est-il plus facile d’accéder à l’aide à mourir qu’à l’aide à vivre?


Gratitude exprimée aux 22 députés qui ont voté contre la Loi le 5 juin 2014

En cette journée du 10e anniversaire de la Loi concernant les soins de fin de vie, le réseau citoyen Vivre dans la Dignité souhaite remercier les 22 députés libéraux qui s’y sont opposés à cause de son ouverture à l’AMM au Québec. Leurs questionnements d’il y a 10 ans demeurent largement d’actualité. Merci Mme Lise Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Pierre Paradis (Brome-Missisquoi), M. Sam Hamad (Louis-Hébert), M. Robert Dutil (Beauce-Sud), M. Pierre Moreau (Châteauguay), M. Robert Poëti (Marguerite-Bourgeoys), M. Jean D’Amour (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Laurent Lessard (Lotbinière-Frontenac), M. Pierre Arcand (Mont-Royal), Mme Kathleen Weil (Notre-Dame-de-Grâce), M. Stéphane Billette (Huntingdon), Mme Christine St-Pierre (Acadie), M. Norbert Morin (Côte-du-Sud), M. Guy Ouellette (Chomedey), Mme Lucie Charlebois (Soulanges), Mme Nicole Ménard (Laporte), M. Gerry Sklavounos (Laurier-Dorion), M. Raymond Bernier (Montmorency), Mme Filomena Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), M. Richard Merlini (La Prairie), Mme Marie-Claude Nichols (Vaudreuil) et M. Saul Polo (Laval-des-Rapides).

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Pour entrevues :

Jasmin Lemieux-Lefebvre
Coordonnateur
Réseau citoyen Vivre dans la Dignité
info@vivredignite.org

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