Dignité à mourir… pourquoi pas dignité à vivre?

Il y a plusieurs années, une de mes amies qui a un enfant handicapé de naissance me demande de l’accompagner pour le visiter. Avant cette demande je ne savais pas qu’elle avait un enfant et ni qu’il n’était pas plus conscient qu’un bébé naissant malgré ses 7 ans. Mon amie pleure tout le long de la route, mais je n’ose pas lui demander pourquoi. En arrivant devant son lit, il rit et gigote comme un petit bébé, voyant mon amie encore les yeux pleins d’eau, je ne savais pas quoi trop dire et je lance cette phrase au petit : ris-tu de moi ou si t’as une belle façon? Et là la préposée de répondre : lui! il est toujours de bonne humeur, il se lève le matin et se couche le soir en riant, toute la journée il est comme ça, joyeux!

Je regarde mon amie, toujours en peine, et lui dit : nomme moi un enfant que tu connais qui rit comme ça tous les jours sans exception, je comprends que tu aurais aimé qu’il soit comme tous les autres enfants, mais lui, il est heureux, tout le temps. J’ai quitté la pièce le temps de chercher un café et à mon retour elle le berçait en riant avec lui et en lui parlant comme à un bébé d’un mois.

Nous nous sommes perdus de vue et environ dix ans plus tard je la revoie et m’avoue qu’elle avait pris la ferme intention de l’étouffer avec son oreiller pour mettre fin à ses souffrances. Mais grâce à ce que j’avais dit, elle avait compris que la fin des souffrances était pour elle et non pas pour lui. Il vit encore et toujours souriant.

Si nous mettions plus de ressources dans les soins palliatifs, pour assurer une dignité pour tous les vivants peu importe leur condition et aider leur famille, nous ne parlerions pas de dignité à mourir. Il y a quelques décennies nous avons mis nos malades mentaux dans les rues avec la « bonne intention » de leur donner un semblant de vie normale, mais nous en avons fait des itinérants aux prises avec la boisson, la drogue et la violence. Le vrai but a été atteint; réduire le nombre de patients internés et ainsi sauver de l’argent. L’aide médicale à mourir n’est-elle pas du même ordre, sous une fausse bonne intention on ne cherche qu’à sauver de l’argent, si la dignité est si importante donnez les moyens de l’avoir pendant notre vivant à tous et toutes.

Gilles Lepage
Cap-Chat, QC

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